1- Des rizières à perte de vue!
2- Partout des foulards à prix dérisoire
3- Une petite araignée?
4- Cascade perdue dans la jungle à Mondolkiri
Fatiguée de travailler, toujours travailler, et d'épargner sur tout. Et si
je m'offrais une vraie folie? Allez, c'est décidé! Je pars loin, très loin...
au Cambodge, un petit pays d'Asie du Sud-Est. Un mois, rien que ça!
Phnom Penh, me voilà!
18 h. L'avion descend doucement vers la piste. «Mesdames et messieurs, nous sommes
arrivés à l'aéroport international de Pochentong. La température est de 26° C.»
Collègues adorés, je pense à vous... Dehors, les voluptueuses odeurs sucrées des
frangipaniers et des bougainvilliers flottent dans la nuit... Retrouvailles avec
la famille (je suis dans mon pays natal!), embrassades et c'est parti! Direction:
l'hôtel situé dans le quartier du Vat Phnom, la pagode perchée sur la colline
de Phnom Penh, la capitale. Une marée de cyclo-pousse, vélos, mobylettes et voitures
se disputent la route et s'évitent comme dans un jeu Nintendo. Les rues fourmillent
de monde et grouillent d'enfants, qui comptent pour la moitié des 13 millions
de Cambodgiens. Un vrai bazar coloré à ciel ouvert!
3 h du matin. Impossible de dormir: trop excitée, trop de choses et de gens à
voir! À 5 h, les premiers klaxons des voitures retentissent: Phnom Penh s'éveille.
À 6 h, c'est le tintamarre! Pour ce premier jour de visite, je choisis un cyclo-pousse.
J'embarque derrière un homme au visage buriné, à la stature plus proche de Woody
Allen que de Schwarzy... Les apparences sont trompeuses; mon Woody aux mollets
de moustique est capable de porter une famille de cinq personnes ou d'énormes
ballots de tissus dans son pousse-pousse! Le seul truc à ne pas oublier si on
tient à ses deux jambes: les garder bien serrées à l'intérieur, car gare aux motos
et aux voitures! Et prier!!! En quelques miraculeux coups de pédales, le cyclo-pousse
arrive devant le Palais royal et longe le quai Sisowath, la terrasse Dufferin
des Phnompenhois face au Tonle Sap, un bras du Mékong, ce fleuve-serpent de 4
200 kilomètres qui traverse notamment le Laos et le Viêtnam. Des maisons sorties
tout droit de Westmount se dressent à côté de paillotes au toit de palmier. De
belles villas coloniales tombent en ruine. Des odeurs de friture, qui s'élèvent
des casseroles des marchands ambulants, se mêlent à celles du jasmin et des orchidées.
Et malgré les services de nettoyage, les immondices jonchent de nombreuses ruelles.
Pas grave! Le temps est magnifique, et la chaleur humide (30 °C), pas trop étouffante.
Heureuse, je suis heureuse!
Miam, des grillons poêlés!
Journée familiale. On rattrape le temps perdu, on se raconte les derniers potins,
on chante sur des vidéoclips sirupeux... et on mange! Partout en Asie, c'est LE
sport national, avec le karaoké! À cause de la chaleur, tout le monde grignote
sans arrêt: soupe aigre-douce au tamarin et à la citronnelle, papayes, corossols,
jus de canne à sucre, pâtes sautées ou... grillons poêlés au sel! Je suis d'un
conformisme culinaire affligeant: je me régale simplement d'un ketuille Phnom
Penh, la soupe aux vermicelles, crevettes et porc. Le prix? Environ 4 000
riels ou 1 $US. Je file maintenant chez la couturière avec le dernier modèle Saint
Laurent que j'ai découpé dans le Vogue: «Je veux çaaa!!» Trois jours après
ma commande, j'ai ma petite robe dégriffée à... 7 $US! L'autre endroit incontournable:
le psar Tuol Tom Pong ou marché russe (les Soviétiques venaient y faire leurs
courses dans les années 80). Antiquités, soies multicolores précieuses, statues
en grès ou en marbre, bijoux et vêtements de marque (Gap, Adidas, Ralph Lauren,
etc.) à mini-mini-prix me font de l'oeil. Impossible de résister! Je marchande
ferme (les prix peuvent varier du simple au double) et transpire à grosses gouttes:
dans ce marché couvert, la température avoisine les 45º C!
À l'aventure!
En route pour Mepring, un village situé à 1 h 30 de Phnom Penh, avec l'équipe
de TVK, la télévision francophone, pour assister à l'entraînement des conducteurs
de pirogues en vue de la Fête des eaux dans la capitale. Comme notre jeep ne passe
pas dans les minuscules chemins boueux menant au lac, nous devons marchander le
reste du trajet avec des villageois. L'accord conclu, notre «chevauchée fantastique»
en mobylette s'élance... et s'arrête net à l'entrée des rizières, trop profondes.
Obligée de marcher! Avec un (gros) risque: jouer à guili-guili avec une sangsue
ou un serpent d'eau! Mais je n'ai pas le choix, c'est ça ou rester seule avec
les buffles!
Je respire un bon coup, je regarde, très zen, le paysage magnifique, et j'avance...
Quinze minutes longues, mais longues... Le reportage en boîte, on reprend la route.
On s'arrête à Skuon, à l'entrée de la ville. Aussitôt, une nuée de jeunes filles
nous proposent boissons et nourriture. Ces taches noires, là-bas... des cuisses
de grenouille sur le barbecue? Nooon! De grosses araignées velues aux yeux rouges
grillées! Il paraît que c'est LE remède anticancer et que le goût s'apparente
à celui du poulet...
Pause culture...
Retour dans la capitale, où je décide de visiter un peu... À l'intérieur de la
Pagode d'argent (plus de 5 000 dalles en argent couvrent son sol) trône un bouddha
en or de quelque 90 kg autour duquel se dressent une vingtaine d'autres en bronze
ou en argent de toutes tailles. Des bâtons d'encens fument dans les pots posés
à leurs pieds... Le jardin, lui, est ravissant. Ici, des bassins de nénuphars
aux couleurs pastel; là-bas, un endroit ombragé entouré de bouddhas en pierre
et cerné d'immenses arbres. Pas un bruit...
Le lendemain, départ à 6 h pour Mondolkiri, dans le nord-est
du pays. Une province peuplée de tribus montagnardes, très peu visitée par les
Cambodgiens, car difficile d'accès et trop éloignée de la capitale. Les routes
de terre parsemées de nids-de-poule de la taille d'une minipiscine me font presque
regretter celles du Québec! Après 10 heures de route, j'arrive enfin à Sen Monorom,
«grosse» ville de 7 000 habitants nichée au coeur de collines verdoyantes. Quel
choc! Le paysage vallonné ressemble aux Laurentides ou à la Suisse, des sapins
bordent les routes et la terre rouge vif rappelle le bush australien! Il fait
frisquet: 22° C le jour et 15º C, la nuit. Oubliés, les 35° C tropicaux! Le guesthouse
est très confortable et les propriétaires, adorables. Pour 5 $US la nuit, j'ai
droit à une chambre et salle de bain impeccables, des draps à motifs de Mickey
et un couvre-lit rouge à grosses fleurs jaunes! Plus kitsch que ça... Mondolkiri
est l'endroit rêvé pour les trekkings à dos d'éléphant, les balades en moto et
les baignades dans des cascades, perdues dans un décor de lianes et d'arbres géants...
Ma plage à moi
En route pour Sihanoukville, la station balnéaire préférée des Cambodgiens (qui
porte le nom du roi actuel), sur la côte sud du pays. Je choisis de fuir les plages
côtières, et je prends le large vers l'île aux Serpents. Vingt minutes plus tard,
j'accoste. Ouaaah! une plage de sable ultra-blanc, des cocotiers, une eau bleue
limpide à 35° C (je vous jure!)... et PERSONNE!!! Je nage, je bronze, je nage,
je bronze. Duuure vie!
Au bout de quelques jours, je repars à l'aventure... Un bateau bondé m'amène à
Siem Reap, la ville des temples d'Angkor. Villages posés sur les rives, berges
ocres ou vertes, pirogues de pêcheurs... Ces quatre heures sur le Mékong sont
un véritable enchantement! Le bateau s'engage dans le village flottant de Chong
Kneas; des gamins plongent dans les tapis de jacinthes d'eau... À moi les temples!
L'ancienne capitale royale du Cambodge en compte plus de 300; faits de grès rose
ou gris, érigés entre les IXe et XIVe siècles, disséminés dans 300 km2 carrés
de jungle. Des grands, des petits, des moyens... Je pénètre dans un monde fantasmagorique
de milliards de tonnes de pierre! Plus qu'Angkor Vat, l'emblème du drapeau national,
qu'Angkor Thom ou que Banteay Srey, «la citadelle des femmes» dédiée au dieu Shiva,
mon préféré est le peu visité Beng Mealea. J'ai marché 15 minutes, croisé un énooorme
serpent (un boa?), mort heureusement, et des vers de terre de la taille d'une
couleuvre avant d'arriver devant cette merveille, complètement envahie par les
orchidées sauvages et les racines tentaculaires des banians (figuiers géants).
Avec l'aide de mon guide, j'escalade, je saute, je franchis allègrement des monceaux
de pierre et je m'agrippe à de sinueuses lianes! J'en oublie presque les araignées
et autres gentilles bibittes qui me frôlent dans les sombres tunnels... Fabuleux!
Mais les vacances sont déjà terminées. Les images, les parfums et les sourires
des enfants se télescopent dans ma tête. Je ne veux rien oublier... Et je reviendrai.
C'est une promesse.
Un grand merci à Air France, grâce à laquelle ce voyage a été
possible.